Entre 2018 et 2021, une chute vertigineuse a frappé la population de crabes des neiges au large de l’Alaska. Environ 10 milliards de ces crustacés, soit 90% de la population locale, ont disparu. Face à cette hécatombe, l’Alaska a suspendu sa pêche au crabe des neiges pour 2022 et 2023.
La question demeurait : que s’est-il passé pour les crabes des neiges de la mer de Béring ? Les chercheurs, pêcheurs et communautés locales, tous dépendants de cette ressource, cherchaient des réponses.
La lumière a enfin été faite. Selon une étude récente publiée dans la revue Science, ces crabes auraient succombé à la faim, conséquence des vagues de chaleur marine de 2018 et 2019. Une surpopulation de crabes en 2018 a également exacerbé la situation.
Cody Szuwalski, de la NOAA, décrit la situation comme un “véritable désastre halieutique”.
Habituellement épanouis dans les eaux froides de la mer de Béring, les crabes des neiges ont vu leur besoin calorique augmenter avec la montée des températures. La concurrence pour la nourriture s’est intensifiée, notamment à cause de la surpopulation de 2018. Résultat : de nombreux crabes sont morts de faim, comme en témoignent les tailles réduites des spécimens capturés après les vagues de chaleur.
“Leur besoin calorique a quadruplé entre 2017 et 2018”, souligne Szuwalski.
D’autres espèces, comme la morue du Pacifique, ont profité de cette faiblesse, envahissant l’habitat des crabes et se nourrissant des rescapés.
Les crabes ne sont pas les seuls affectés. Saumons, oiseaux marins et phoques ont aussi subi les conséquences des vagues de chaleur. Christopher Harley, zoologiste, note une augmentation des effondrements d’écosystèmes liés à des températures extrêmes.
Cependant, certaines espèces, comme la morue charbonnière, ont bénéficié de cette hausse des températures. Cela montre que certaines espèces s’adaptent plus vite que d’autres aux bouleversements climatiques. Mais si le réchauffement continue, la biodiversité de la mer de Béring pourrait être radicalement transformée.
Szuwalski rappelle l’importance de prendre en compte le changement climatique dans les stratégies de conservation. “Le changement climatique bouleverse nos plans et systèmes de gestion”, dit-il.
Quant à l’avenir des crabes des neiges en Alaska ? Ils pourraient revenir, mais pas avant quatre ans. À long terme, ils pourraient migrer vers le nord, à la recherche d’eaux plus froides. “Nous ne verrons probablement plus autant de crabes des neiges près de l’Alaska”, conclut Szuwalski.